Après trois semaines de course, l'Allemand Marcel Kittel, comme l'année dernière, est venu boucler la Boucle dimanche 27 juillet dernier concluant ainsi une très belle édition 2014 du Tour de France. Parce qu’après les abandons de Christopher Froome et d’Alberto Contador, Vincenzo Nibali fut un maillot jaune comme on l’aime : attaquant, impérial. Parce que nos français nous ont fait vibrer, ces Bardet, Pinot qui ont pris rendez-vous avec l’avenir. Parce que la France est belle et que le Tour est la plus belle des épreuves cyclistes, merci à tous les coureurs pour ces trois semaines intenses. L'heure est désormais aux bilans. 

Un Maillot Jaune impérial

On entend dire ici et là que Nibali n’aurait pas remporté ce Tour de France s’il n’avait pas bénéficié des abandons de Christopher Froome et d’Alberto Contador. Certes il a su saisir sa chance au même titre que Jean-Christophe Péraud et Thibaut Pinot ! Vincenzo Nibali a démontré dès les premiers jours qu’il fallait bien compter sur lui pour la victoire finale. Si comme à son habitude il n’a pas convaincu dans les épreuves précédant le Tour, à Sheffild, lors de la deuxième étape il s’est emparé de la tunique jaune. Il a su être offensif dès la première semaine dynamitant une course comme il sait le faire et en piégeant les favoris lors de l’étape sur les pavés (que je sache, Alberto Contador était encore présent à ce moment-là ?). Pour lui, « risquer de perdre une course  est parfois la meilleure façon de gagner » disait-il dans Pédale  l’Italien a su appliquer ce leitmotiv à merveille sur ce Tour de France. Il fut plus intelligent que tous les autres sur les pavés, le plus costaud dès que la pente s’élevait et même sur le chrono final il a été impressionnant. Au total, le Squale aura lâché à deux reprises son Maillot Jaune : lors des premières et huitièmes étapes. Si pour lui pendant une course il ne faut pas seulement se limier au relief, « il faut faire preuve d’inventivité », Vincenzo Nibali su trouver la formule gagnante : attaquer là où il le faut pour faire mal à ses adversaires.

À Péraud, au Pinot

Derrière Nibali, on a longtemps pensé que la seconde place allait être acquise à Alejandro Valverde, jusqu’au moment où l’Espagnol craque complètement lors du contre-la-montre de Périgueux. On aura vu le coureur de la formation Movistar sans cesse limite dès que la pente s’élevait. Valverde avait déjà perdu du temps à Chamrousse, il a vu sa place sur le podium se réduire comme peau de chagrin lors des étapes pyrénéennes pour finalement la céder à Hautacam. À la veille d’un contre-la-montre décisif pour le podium, les français ont réalisés un beau tir groupé en s’emparant des deuxièmes et troisièmes places. Thierry Adam en émoi, il leur fallait désormais tenir ce rang. Comme pour Vincenzo Nibali, est-ce qu’ils auraient pu monter sur le podium si Froome et Contador n’avaient pas abandonnés. Très certainement mais sûrement pas à deux. Quoi qu’il en soit, ils ont su saisir l’opportunité et attaquer Valverde quand il le fallait pour l’écarter définitivement du podium. La menace éloignée, il ne leur restait plus que le chrono pour se départager tant les deux hommes ont été impressionnants en montagne : Pinot a su attaquer Romain Bardet pour lui ravir le Maillot Blanc, Péraud a été le seul à pouvoir suivre Nibali. Enfin, n’oublions pas le magnifique Tour des Français : deux victoires d’étapes (Blel Kadri à Gérardmer et Tony Gallopin à Oyonnax), Tony Gallopin en Jaune le 14 juillet, l’équipe AG2R La Mondiale qui remporte le général des équipes, et sept coureurs Français dans les 25 premiers, c’est un bilan plus que positif. Avec la nouvelle génération sans-complexe qui arrive avec Romain Bardet (6ème pour son premier Tour), Pinot (en Blanc et 3ème) sans oublier Pierre Rolland (11ème diminué de son Giro) et avec Péraud, le cyclisme Français à de belles histoires à écrire.

Majka la révélation a fait le Poids, Sagan ou la Green Attitude

7ème du Giro 2013, 6ème cette année, premier Polonais à remporter le classement du Meilleur Grimpeur du Tour de France, Rafal Majka n’arrête plus sa progression. À 24 ans, le coureur de la Tinkoff-Sako fut appelé au dernier moment pour remplacer au pied-levé Roman Kreuziger. Il devait être le lieutenant d’Alberto Contador en montagne, son abandon a totalement chamboulé les cartes de sa formation. Libre suite à l’abandon de son leader, Majka en profite et nous fait plaisir dans une belle bagarre dans la course au Maillot à Pois avec Joaquim Rodriguez. Premier fait d’arme dans ce Tour de France 2014 : la dix-neuvième étape. Après une échappée, il remporte à Risoul sa première victoire dans un grand Tour. Tout s’enchaîne, il s’empare quelques jours plus tard du Maillot à Pois aux dépens de Purito Rodriguez et remporte une nouvelle victoire d’étape au Pla d’Adet. Son Maillot à Pois, il ne lâchera plus jusqu’à la fin du Tour. Enfin, comment ne pas évoquer le cas Peter Sagan. Sans forcer, le Slovaque remporte son troisième Maillot Vert. Souvent placé à l’arrivée, il a prouvé que ce classement ne récompense plus le meilleur sprinteur, mais bel et bien le coureur le plus régulier : celui qui sait aller chercher les points lors des sprints intermédiaires, celui qui sait bien se placer lors des arrivées. À ce rythme-là, il peut facilement le remporter pour trois années supplémentaires.

Conclusion générale

Ce Tour de France 2014 fut un grand millésime. Ouvert en grandes pompes  sur les routes Anglo-Saxonnes. Les Anglais ont réservé un accueil plus que chaleureux au peloton et à la caravane du Tour. Souvenez-vous du public réunis en masse dans les côtes du Yorkshire, les coureurs étaient obligés de fendre la foule en deux rappelant ainsi les grands cols français. Le Grand Départ d’Angleterre fut un véritable succès et a rencontré un engouement populaire exceptionnel. Ensuite, ce Tour de France fut exceptionnel par les émotions que les coureurs nous ont faites passés. Certes il y a eu les exploits de nos Français, mais l’image de ce Tour est bien celle d’Andrew Talansky. Le coureur Américain a fait preuve d’un courage extraordinaire lors de la 11ème étape. Tombé lors du sprint à Nancy, il finit à nouveau à terre dans la descente du col des Chevrères lors de l’étape de la Planche des Belles Filles. Sans plus aucune chance de bien figurer au classement général, Andrew Talansky prend le départ le lendemain à Besançon, mais il va vivre sa journée la plus cauchemardesque. Distancé rapidement attendu par aucun de ses coéquipiers, il perd huit minutes sur le groupe Maillot Jaune. À cinquante kilomètres de l’arrivée, on le voit s’arrêter, on pense alors que s’en est terminé pour lui, mais il écoute son directeur sportif et repart, en larmes. Andrew Talansky rejoint finalement l’arrivée à Oyonnax juste dans les délais après avoir passé plus de 60 kilomètres en solitaire. Un exemple de courage et d’abnégation tout simplement. Enfin, comment ne pas retenir l’émotion du Maillot Jaune Vincenzo Nibali sur le podium des Champs Elysées, les yeux pétillants, au bord des larmes lorsque le Fratelli d’Italia a retenti, le Tour a découvert un homme simple et attachant et qui combat fermement le plus grand fléau du cyclisme de ces dernières années. Après une édition riche marquée par un départ d’Angleterre, la pluie, les pavés, les chutes, les abandons, les sprints, Marcel Kittel est venu conclure trois semaines de course par un sprint final royal sur la plus belle avenue du Monde. Pendant trois semaines nous avons tous vibrés derrière les exploits des 198 coureurs du peloton. Et cette année, le peloton nous a régalés. Mais voilà, c’est fini. C’est triste à dire, mais qu’est-ce que ce fut bon ! Tous ces champions ont pris rendez-vous l’année prochaine à Utrecht pour un Tour 2015 aussi explosif.