À seulement 24 ans, Clément Koretzky sait plus  que quiconque la chance qu’il a d’être encore professionnel. Ce puncheur, en fin de contrat chez Bretagne-Séché Environnement (Continentale Pro, 2ème division mondiale)  n’avait toujours pas d’équipe à l’approche de fêtes de fin d’année. Mais le Languedocien s’est démené pour trouver une formation. Pour ce, il monte notamment une association pour récolter des fonds. C’est finalement au sein du Team Vorarlberg (Continentale, 3ème division mondiale), une formation Autrichienne qu’il trouve refuge et qu’il compte bien faire œuvre de tout son talent.

Ce jeune coureur fait parti de ceux qui n’ont pas peur d’attaquer. Toujours prêt à se montrer dans les échappées, cela ne paye malheureusement pas toujours. En avril dernier, il rentre même en tête sur la mythique Trouée d’Arenberg lors de  Paris-Roubaix. Il chutera quelques kilomètres plus loin et on lui diagnostiquera une déchirure musculaire à la jambe droite. Cela le pénalisera pour la suite de sa saison.

Clément revient pour Vavel sur l’abnégation dont il à fait preuve pour trouver une nouvelle formation et ses objectifs pour la saison à venir. Il nous en dit également plus sur ses premières impressions avec sa nouvelle équipe étrangère et ses ambitions à plus long terme. 

Comment s’est passée votre préparation hivernale alors même que vous n’étiez pas sûr de pouvoir courir chez les professionnels ?

 Le vélo c’est une passion plus qu’un métier. Je me suis donc entrainé un peu dès début novembre surtout pour le plaisir, tout en cherchant une équipe. J’ai été approché par le Team Vorarlberg mi-décembre et de là j’ai commencé à bien m’entrainer en faisant un planning cohérent dans l’objectif d’être prêt pour début mars. Depuis début janvier, je m’entraine avec le même rythme que lorsque j’étais chez Bretagne-Séché Environnement.

Qu’est ce qui a déterminé votre choix pour aller dans cette équipe Autrichienne ?

J’avais d’autres contacts mais je connaissais déjà Vorarlberg. En terme de budget ils sont limités c’est certain mais après en terme de matériel, d’encadrement, j’ai directement vu que cette équipe était très carrée. Il y a  Nicolas Baldo, un coureur français qui fait déjà parti de l’équipe que j’ai pu avoir au téléphone, il a répondu aux questions que j’avais en tête et m’a de suite fait comprendre que c’était une équipe sérieuse. Parfois on dit en rigolant que les Allemands n’ont pas la même mentalité car ils sont toujours très rigoureux, mais là j’ai pu m’apercevoir que c’était vraiment ca. Les Français on est également sérieux mais eux c’est encore plus carré. On peut être sûr qu’ils ne vont pas nous la faire à l’envers.

Est-ce que vous avez pu rencontrer les coureurs de votre nouvelle équipe ?

Non malheureusement. Ils ont fait le premier stage juste avant que j’apprenne  que j’allais rejoindre l’équipe, du coup je n’ai pas pu y participer. C’est vrai que j’aurais aimé les rencontrer un peu avant mais de toute façon il n’y pas de raison que cela ne se passe pas bien. C’est déjà super d’avoir une équipe donc après je n’ai vais pas trop en demander non plus et dire je veux voir les coureurs.

« Je n’ai pas regardé le côté financier »

Pouvez-vous en dire plus sur l’association que vous avez créée pour pouvoir financer votre recrutement ?

À l’origine, l’association a été faite dans le but de récolter des fonds pour intégrer une équipe française. Au début elles m’ont dit  pas de soucis pour venir mais il fallait que je me paye mon salaire car je m’y suis prit trop tard. Leurs budgets étaient bouclés. Dans le peloton il y a de plus en plus de coureurs qui se financent eux-mêmes avec des sponsors alors je me suis dit, pourquoi pas moi ? J’ai donc monté un projet participatif, j’allais  le mettre sur internet mais je ne l’ai pas fait car à ce moment-là, les dirigeants du Team Vorarlberg m’ont dit qu’ils me prenaient.

Votre projet de financement a tout même abouti ?

Oui, une des conditions du Team Vorarlberg était qu’ils ne pouvaient pas me payer mes déplacements. Comme mon salaire ne sera pas non plus très élevé, cette association me permettra de subvenir à mes besoins et de payer mes déplacements. En contrepartie, les groupes privés qui m’ont financé pourront utiliser mon image. Par exemple, s’ils veulent que je vienne à des manifestations ou autre j’irais.

C’est risqué d’un point de vue financier.

C’est sûr que j’aurais mieux gagné ma vie dans une équipe française mais je n’ai pas regardé le côté financier. J’ai plus pensé à ma carrière en me disant que, eux me permettent de rebondir. Quand on voit les courses sur lesquelles ils vont être alignés, c’est vraiment énorme.  À part l’absence sur Paris-Roubaix, Paris-Nice, et le Tour de France bien entendu, ils ont de très belles courses. Le programme est excellent presque équivalent à celui que j’aurais eu avec Bretagne-Séché Environnement. Ils n’ont rien à envier aux belles équipes françaises.

« Le Team Vorarlberg me fait totalement confiance»

Comment cela se passe avec le staff pour déterminer votre programme de course ?

Le staff m’a envoyé une liste avec toutes les courses sur lesquelles ils sont partants en me disant de choisir ce que je voulais. J’ai donc fait tout un programme et lors de la présentation de l’équipe fin février je leur demanderai si cela coïncide avec ce qu’ils attendent de moi. Normalement il n’y a pas de raisons pour que cela se passe mal car jusque-là,  ils ont été très compréhensifs et ils m’ont laissé la chance de m’exprimer. Après s’ils me disent qu’il faut que j’aille sur telle ou telle course, bien entendu je ne dirais pas non.

Sur quel type de courses devriez-vous être aligné alors?

L’équipe est sélectionnée sur au moins huit manches de Coupe de France. Il y a par exemple le Tour du Finistère, le Tro Bro Leon ou encore la Route Adélie. Sinon il y à également des courses comme les Boucles de la Mayenne, Paris-Arras Tour, le Tour de Gévaudan, le Rhône-Alpes Isère Tour.

Vous pourrez donc largement évoluer en France et garder une certaine visibilité auprès des managers.

Oui, c’est sûr que je viens dans cette équipe pour me relancer mais après je ne me dis pas je viens pour un an et je m’en vais. J’espère que l’équipe va progresser, qu’ils pourront faire venir de plus gros sponsors et s’ils disent qu’ils me gardent, je reste avec plaisir. En tout cas, j’ai été ravi de leur approche et de leur sérieux. C’est certain que l’on ne crache pas dessus lorsque des managers nous approchent mais maintenant c’est une aventure pour moi de partir là-bas et je ne vois pas pourquoi cela ne me plairait pas. Entre coureurs on parle Anglais mais ils m’ont même demandé d’apprendre l’Allemand, donc j’ai repris des cours. C’est aussi un moyen de s’intégrer plus facilement.

Pour revenir sur votre départ de chez Bretagne-Séché, attendiez-vous  à ne pas être conservé dans l’effectif ?

Je ne cache pas que je ne m’y attendais pas trop. J’étais loin d’être le meilleur de l’effectif mais… À la rigueur, je n’aurais pas mis un pied devant l’autre, mais là. C’est sûr qu’à partir de Paris-Roubaix je n’ai plus fait de résultats mais j’avais une déchirure musculaire. L’année précédente c’est pareil, avant que je me casse la clavicule sur le Tour de Turquie j’étais présent. Maintenant ca fait deux saisons, deux saisons je me blesse, mais moi j’ai rien demandé. Ce n’est pas comme si j’étais tombé tout seul en partant faire du VTT ou je ne sais quoi et  là je pourrais m’en prendre qu’à moi.

On vous voyait pourtant souvent à l’avant des courses.

C’est sûr, j’aime beaucoup attaquer, je suis un coureur très offensif. Même si Bretagne-Séché Environnement est une grosse équipe, cela reste une petite équipe à l’échelle mondiale, donc j’avais un profil intéressant pour eux car je leur faisais beaucoup de publicité. Au delà d’être coureurs cyclistes on est aussi une pancarte publicitaire. Le fait d’être souvent à l’avant de la course leur apportait, donc c’est vrai que je n’ai pas trop compris leur vision quand ils m’ont dit qu’ils ne me gardaient pas.

« J’ai pris en maturité»

Est-ce que vous avez une pointe d’amertume par rapport à la manière dont cela s’est passé ?

Je ne suis pas parti en mauvais terme, si je croise Emmanuel Hubert (NDLR : manager général de Bretagne- Séché Environnement) je lui parle avec plaisir même si je ne cache pas que j’ai quand même eu du mal à comprendre leur choix. Malgré tout, cet hiver j’ai pris conscience que tout pouvait s’arrêter, que le vélo était important dans ma vie. Même si cela reste une petite équipe, j’espère faire mon petit bout de chemin là-bas. J’ai pris en maturité pour essayer d’être un peu moins  « foufou » en course.

Que vous apporte le fait de courir dans une équipe étrangère ?

Je pourrais faire un reproche à Bretagne-Séché Environnement, même si je les comprends, c’est que l’on nous donnait les programmes de courses presque d’une semaine à l’autre. Je sais que ca se passe beaucoup comme cela en France, c’est une manière de fonctionner. A l’étranger, ils ont leur programme un mois voire un mois et demi à l’avance. Personnellement, j’ai besoin d’être serein dans ma tête, et ne pas me dire quelle course je vais faire, ce que je dois travailler pour telle ou telle course. Si je sais trois semaines à l’avance une course que je vais faire, je sais que je vais pouvoir travailler fort en fonction du profil de la course.

Est-ce que vous vous imaginez rester longtemps dans une équipe étrangère ?

Pour le moment, c’est difficile de dire car je n’ai pas vraiment commencé mais c’est sûr que l’approche que j’ai eu avec le Team Vorarlberg est vraiment exceptionnelle. C’est à voir, leur démarche est différente. Ils prennent un coureur et ils lui font totalement confiance, du coup c’est super gratifiant et ca donne envie de tout donner pour eux. Je ne veux pas les décevoir.

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