Si l´on remonte au tout début de l´histoire de la Liga, le grand rival du Real Madrid n´était pas le Barça, mais l´Atlético de Madrid. Les catalans n´était qu´un simple concurrent, au même titre que l´Athletic de Bilbao. Même si les matches entre les deux clubs débouchaient souvent sur des polémiques, ce sont deux moments précis dans l´histoire qui viendront donner un gout hostile à cette rencontre. La politisation des clubs ferra le reste. Revenons sur ces deux saisons qui créèrent l´une des plus grandes rivalités du football actuel.

Saison 1915-1916

Demi-finales de la Coupe du Roi. Le Real Madrid et le FC Barcelone doivent donc s´affronter dans une double confrontation (aller-retour). A cette époque, les nombres de but marqués n´avaient pas d´importance. L´équipe qui remportait les deux rencontres s´envoler vers la phase suivante, et si chacune gagnait une rencontre, l´on assistait à un troisième match sur terrain neutre pour les départager. Le match aller fut remporté par le Barça deux buts à un, le retour se solda lui par une importante victoire madrilène, 4-1, avec trois buts de Bernabéu. Les équipes allaient se rencontrer une nouvelle fois. Un joueur culé déclara alors que Madrid n´arrivait pas à la cheville du Barça, et que son équipe se retrouverait donc en finale facilement. Ces déclarations acerbes mirent de l´huile sur le feu, la pression était à son maximum. La belle se joua donc sur un terrain neutre, et le match d´une grande intensité se termina sur un spectaculaire 6 à 6. Alors que la tension était à son comble, il fallait rejouer encore un match. Cette fois-ci, les merengues l´emportent 4 à 2 et se dirigent donc vers la finale qui se joue… à Barcelone ! Problème, le match fait polémique et côté blaugrana, on estime que l´arbitre a joué un rôle décisif dans le sort de la rencontre. La légende raconte même que Santiago Massana, excédé par l´arbitrage, demanda à ses coéquipiers de rentrer au vestiaire, douze minutes avant la fin de la rencontre. D´autre disent que cet épisode eu lieu lors d´un autre match, amical, quelques années auparavant. Résultat, c´est une terre hostile qui accueillit l´équipe de la capitale pour cette finale face à l´Athletic Bilbao. Tellement hostile que les joueurs de Madrid perdirent le nord et la rencontre d´une lourde défaite 4 à 0. Ces quatre matchs marathon étaient le début d'une grande rivalité.

Saison 1942-1943

Même si les hostilités avaient commencés en 1916, le peu de rencontre entre les deux équipes et la guerre civile semblaient avoir calmé jeu. Le gros match espagnol restait le derby madrilène. Mais la double confrontation en Coupe, une nouvelle fois en demi-finale, allait se transformer en l´épisode le plus lamentable du Clásico. Le premier match fut une victoire de Barcelone, sur le score de 3 à 0, avec des buts de Valle, Escolà et Sospedra. Mais c´est l´attitude de public qui laisse place à une polémique. Côté catalan, l´on assure qu´il n´y a eu aucun problème. Côté madrilène, on raconte que les supporters on envahit le terrain et lancés des pierres sur les joueurs. La presse de la capitale ne cesse de répéter ce discours, et l´ambiance devient de plus en plus hostile. Les joueurs catalans sont sous pression dès leur arrivée à Madrid. Certains joueurs du Real, l´arbitre, et les autorités leurs préconisent de se tenir à carreaux. Il se raconte que les joueurs furent même menacés. Des versions qui diffèrent de part et d´autres. C´est donc pétrifiés que les joueurs catalans entrèrent sur le terrain, et les buts madrilènes commencèrent à s´enchainer. A 5 à 0, les supporters de Chamartín envahirent le terrain partiellement, et à la fin du match rebelotte. Leur équipe venait d´infliger une défaite historique aux blaugranas, 11 à 1, et de se qualifier pour la finale. L´ambiance répugnante des deux rencontres lançait la rivalité espagnole. Même si Bernabéu tenta de calmer les ardeurs avec « le match de la Paix », la tension entre les deux clubs ne cessa d´augmenter au cours des années. Aujourd´hui, chaque club peut évoquer de nombreuses rencontres polémiques et historiques face au rival.

L´évolution des modèles

Si l´on s´intéresse à la rivalité du clásico, il faut aussi jeter un coup d´œil sur les idéaux et les valeurs de chaque club, et sur leur évolution dans le temps. On se rend vite compte que le Real Madrid est historiquement le club stable, celui qui met en place des projets à long terme basés sur la cantera. Les succès d'autrefois, les valeurs transmises par Bernabéu, racontent l´histoire d'un club tranquille, tourné vers l´identitaire avec des entraîneurs à son image comme Miguel Muñoz, Miljanic, Boskov, Beenhakker ou bien Del Bosque. Pourtant, aujourd´hui la valse des entraîneurs est devenu quelque chose de récurent au Real Madrid. Neuf entraîneurs se sont succédé sur le banc madrilène en seulement sept ans. Du côté catalan, sur cette même période, il n´y en a eu que deux, Rijkaard et Guardiola.

Les politiques du club étaient aussi différentes. Lorsque Núñez et Gaspart était à la tête de l'entité azulgrana, les recrutements des grandes stars correspondait à Barcelone. Il suffisait qu´un joueur se démarque pour qu´il termine blaugrana. La devise ' plus qu'un club ' justifiait à cette époque des déboursements millionnaires avec les transferts de Maradona, Ronaldo, Cruyff, Romario, Krankl, Rivaldo, etc.... Pendant ce temps, le Real Madrid se convertissait en l´équipe des Garcia, ou celui de la Quinta del Buitre, des équipes au caractère et à l´identité propre. Le produit local primait à l´époque, et encore plus lorsqu´il sortait de la Ciudad Deportiva. Aujourd´hui changement radical, les joueurs de la Masia prennent chaque fois un petit peu plus de place dans le onze catalan et les recrutements stellaires sont œuvre du Real Madrid. Kaká, Ronaldo, Benzema illustrent cette idée d´injecter des sommes monstrueuses pour créer une équipe.

Le mental des deux clubs a aussi évolué ses dernières années. Durant des décennies, Barcelone a pointé les arbitres du doigt lors de ses frustrations sportives, quelque chose que les madrilènes ont toujours interprétés comme un complexe d´infériorité. Mais aujourd´hui les catalans ont lâchés le discours de victime pour ce concentré uniquement sur leur football. A l´inverse, les frasques de Mourinho et compagnie rappelle l´attitude tant critiquée à l´époque dans la capitale... Les modèles semblent bien s´être interchangés au cours des anneés

A suivre.